La Geste des Tisseurs
Par Niabea
Cela faisait déjà
quelques quelques heures que Niabea avait quitté son royaume pour
partir en Saoriandra où les autres Tisseurs ne manqueraient pas de le
rejoindre. Cependant la proximité du royaume d'Ulardon lui donna l'idée
- rassurante il est vrai - de ne pas faire la route seul. Aussi changea
t'il quelque peu son itinéraire pour partir rejoindre le domaine de
Dame Desdemone.
Malgré l'heure qui avançait la chappe de
brouillard ne disparaissait pas tandis qu'il approchait d'Ulardon, pire
même elle devenait toujours plus opaque et, lorsque Niabea arriva au
pont symbolisant la frontière d'Ulardon il eut la désagréable
impression de quitter le monde des vivants pour s'enfoncer dans le
domaine des morts. La rivière prit alors une figure bien plus
menacante, et, telle le Styx, sembla être le point de non retour pour
le jeune homme. Pourtant il savait qu'une fois l'ouvrage franchi il
serait en territoire ami mais une crainte diffuse lui fit stopper la
lente marche de son cheval.
- Nous y voila donc... Le Royaume d'Ulardon... C'est la première fois que je me rends en ces lieux...
Soudain
il aperçut un mouvement sur l'autre rive. Ce ne fut tout d'abords
qu'une impression de voir le banc de brouillard bouger mais il n'en
était en fait rien. Blanc d'effroi le jeune Seigneur de Cadrienia vit
sortir du néant une compagnie en armes, dont la paleur ne laissait
point de doute sur l'état des êtres à l'allure si menaçante qui se
faisaient toujours plus nombreux : c'était des non-morts...
S'il
est vrai que la vie de guerrier puis de Tisseur avait forgé le
caractère du jeune Seigneur voir la mort d'autrui l'avait toujours plus
ou moins marqué. Mais quoi de pire que de voir un être mort évoluer en
votre monde ? Une crainte ancestrale montait en Niabea qui ne bougeait
plus guère désormais. Certes il avait dut déjà affronter pareilles
créatures lors des précédents combats mais jamais aussi nombreuses : la
magie qui avait réveillé ces corps devaient être particulièrement
puissante. Ce n'était donc pas la peur qui paralysait l'humain mais
plutôt l'impression génante d'être en un monde qui n'était pas le sien,
pire même, d'avoir à jamais franchi la frontière du monde de morts.
Ce
fut son cheval qui montra le premier des gestes d'énervement en tirrant
sur son mors pour avancer sur le pont. Niabea sortit alors de sa
torpeur et se rendit compte qu'il n'avait toujours pas franchi les
quelques mètres qui le séparait d'Ulardon malgré déjà de longues
minutes passées à cet endroit. Se secouant la tête pour reprendre ses
esprits il se rappella l'urgence de sa mission et d'un coup de talon
poussa son destrier à avancer.
Mais, alors qu'il venait de
s'engager sur le pont un bruit de roues - d'un carosse ou d'une
charette sans nul doute - se fit entendre un peu plus loin dans la
brume. Pour la deuxième fois en quelques minutes Niabea stoppa
instinctivement son cheval et tentant de percer le brouillard de ses
yeux attendit le coeur battant qu'apparaisse le véhicule.